C’est en contemplant pendant trois jours et trois nuits, sans manger ni dormir, les ravages de la rivière en crue sur ses champs, l’eau stagnante qui d’un coup d’un seul a noyé ses terres, qu’Edgar Flétan renonce.
Il renonce à ce combat contre les éléments pour préserver seigle ou sarrasin, à l’amour de la nature, aux mains tendues de ses voisins, à sa vie qu’il veut désormais changer.
Il maudit ce qui compose son monde, la faune, la flore, les paysans, anciennement freres dans la lutte contre la nature. Et quand enfin l’eau se retire, laissant derrière elle ravage et désolation, Edgar n’est plus le même homme.
Adélaïde, sa femme a beau expliquer à ses deux filles
« qu’être paysan équivaut à se battre contre des moulins à vent et que les hommes – leur pere était un de ceux-là – avait le droit de se lasser d’une telle folie, ancestrale de surcroît », l’entourage d’Edgar Flétan reste médusé par son attitude.
Jamais ils n’avaient vu un tel désintérêt pour la terre.
Et quand l’annonce est faite qu’il vend sa ferme aux enchères pour partir à la ville, tous sont d’accord pour dire que le paysan leur fait honte et qu’il attire les mauvais présages.
Dans ce récit de la folie d’un homme qui se renferme en lui-même et de la survivance de trois femmes, l’épouse et ses deux filles, dans un monde nouveau, inconnu, la ville, la quête de Daniel Arsand séduit.
Une quête de l’âme humaine et de ses bouleversements qu’il mène d’une plume nourrie de la terre et des êtres qu’elle déchire et dont l’unique paradis est ce monde qu’ils se créaient en eux, pour survivre, « en silence ». –Hector Chavez